Je suis née le 24 février 1948, à St-Romuald, petite paroisse du comté de Lévis.
Mon père travaillait comme machiniste, ma mère était à la maison. Je suisx8la deuxième enfant d’une famille de cinq. J'étais considérée comme le « mouton noir » de la tribu, et cela parce que ma mère l’avait décrété. D’après elle, je ne faisais rien de bon, je n'étais pas aimable. Alors que l’aînée était parfaite, docile, dépendante, j’étais, selon sa perception, tout l’inverse. Ma soeur n'a jamais tenté de me protéger du courroux maternel; au contraire elle profitait de la position dans laquelle je me trouvais.
Ma mère avait une préférence marquée
pour l’aînée et la cadette de la maison. Elles auront droit couramment à des
faveurs et bénéficieront d’un certain pouvoir.
J’ai été élevée dans l’injustice, le manque de respect, l’humiliation, le dénigrement. Des fessées j’en ai reçues de ma mère, parfois avec des croûtes de bois ou un cintre. Et bien souvent pour des riens, des pécadilles. De la hargne j’en ai vécue; elle passait ses déceptions et ses frustrations sur moi. Je la revois toujours le visage fâché, l'air furieux. J'en avais très peur.
Mon père ne m'a jamais frappée. Je sentais qu'il avait peut-être une petite préférence pour moi, mais il nous traîtait tous également. Je ne suis pas sûre qu'il savait ce qui se passait à la maison lorsqu'il était absent. Il était trop faible pour remettre ma mère à sa place. J’ai été une petite fille craintive, blessée, anxieuse, ayant perdu toute estime de soi, ignorante de ses possibilités et de ses forces. De l’enfance à la ménopause, je vivrai avec des migraines fréquentes et affligeantes.
Ma grand-mère maternelle venait me chercher parfois pour passer du temps avec elle. C'était une personne douce, aimante. Malheureusement, elle est décédée alors que je n'avais que 5 ans. Elle aurait pu être une figure marquante dans ma vie si elle avait vécu plus longtemps.
J'ai très peu de souvenir de ma petite enfance. Parfois, je me demande si j'en ai eu une. Même au-delà de cinq ans, je ne me souviens pas de beaucoup de choses. On dirait que je suis apparue sur terre subitement à la puberté.